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cumpedibus

De Paris à la Mer le long de la Seine: 3e partie. Rouen - Le Havre

3 Décembre 2023 , Rédigé par Guillaume Lagrée

Plage du Havre

Plage du Havre

GR2 Sentier de la Seine

de Rouen (76) au Havre (76)

La Seine Maritime

 

6 jours de marche

Dimanche 15 – vendredi 20 octobre 2023

Train Nomad Paris Saint Lazare – Rouen Rive droite : 1h08

Train Nomad Le Havre – Paris Saint Lazare : 2h15

 

Après être allé en Normandie de Vernon dans l'Eure à Rouen en Seine Maritime, en avril 2023, après être passé de Nyon en Suisse à Aoste en Italie, franchissant les Alpes, en juillet 2023, me voici de retour en Normandie, en Seine Maritime, en octobre 2023, pour finir le GR2 , sentier de la Seine, par l'embouchure, en mer, en Manche.

Sortie de Rouen

Sortie de Rouen

Dimanche 15 octobre : Paris – Rouen – Saint Pierre de Manneville

Départ de Canteleu : 13h30

Arrivée à Saint Pierre de Manneville : 18h30

Gîte la Folie douce à Saint Pierre de Manneville.

Hier soir, j’ai laissé mon beurrier aux voisins de palier. Je leur laisse souvent ma place de parking. Echange de bons procédés. Eau et électricité coupés en partant. Métro pour la gare Saint Lazare. Train pour Rouen Rive droite. Arrivée à 11h01. Je retrouve tout de suite mon ami C comme à la fin de la 2e partie de cette randonnée, de Vernon à Rouen, devant la cathédrale de Rouen, chère à Claude Monet qui l'a représentée sur 30 tableaux.

Je recommande ses images de voyage, prises par un drone, Carpe Mundi.

C m’emmène en voiture sur les quais de la Seine à la sortie de la ville, là où la Grande Armada de Rouen déploie ses grands voiliers tous les 4 ans. Moins bien cette année 2023 d’après lui qui vit depuis 20 ans à Rouen. Après un risotto et une panacotta (sucres lents et sucres rapides pour randonneurs), C. m’emmène en voiture à la sortie de Rouen, à Canteleu. Arrêt le long de la piste cyclable où je pourrai marcher le long de la Seine jusqu’à Saint Pierre de Manneville, mon objectif du jour.

Etape facile, plate, un peu longue, avec du soleil, du vent et de la fraîcheur. Je renouvelle mon bronzage du visage. Aucune difficulté technique. La Seine est désormais maritime. La marée se manifeste jusqu’à Rouen (mascaret 6h après le Havre). Le cours du fleuve est large, les bateaux marchands sont bien plus gros que les péniches à Paris et les entrepôts énormes. Rouen est le plus gros port céréalier d’Europe m’explique C. C’est d’ici que les céréales de la Beauce et de la Brie prennent le large.

Je croise d’abord la maison de Gustave Flaubert à Croisset. Il n’en reste qu’un vague pavillon. Après sa mort en 1880, sa nièce et héritière vendit les 3ha de terrain en bord de Seine pour payer les dettes de son mari. Tout fut rasé pour bâtir une distillerie industrielle d’alcool. Flaubert en aurait hurlé de rire et en aurait fait un conte drolatique.

Je vois ensuite un couvent troglodyte collé aux falaises de la Seine. En bord de fleuve, la colonne de Napoléon au Val de la Haye date de 1846 et commémore le transfert du cercueil de Napoléon Bonaparte en 1840. C’était le 9 décembre et il faisait -10°C quand le cercueil fut transféré du navire de haute mer au bateau fluvial qui le descendit jusqu’à Paris pour l’enterrer aux Invalides. Tout est expliqué à côté de la colonne bien entretenue.

Série de châteaux du XVIe, XVIIe, XVIIIe siècle avec vue sur Seine en bon état et manifestement habités. Ici, c’est riche. L’argent circule le long de la Seine et cela se voit. « Il existe trois fluides sur Terre : l’eau, l’air et l’argent » (Jacques-Yves dit le commandant Cousteau).

« Paris, Rouen, Le Havre ne sont qu’une ville dont la Seine est l’avenue principale » (Jules Michelet). C’est tellement vrai que le port maritime s’appelle désormais HAROPA (allusion subtile à EUROPA) PORT (HAvreROuenPAris) m’apprend C. tant les trois villes sont interconnectées.

La patronne du gîte s’inquiète de mon sort et me demande plus fois à quelle heure j’arrive. Je finis par l’appeler à 16h30 lors d’une pause sur un banc devant le bac de Sahurs – La Bouille. Automobiles, deux roues et humains peuvent ainsi passer la Seine sans pont.

En fait, la patronne sort ce soir. Elle m’explique tout et me laisse de quoi grignoter en complément des victuailles dans mon sac.

Arrivé à Saint Pierre de Manneville, je tombe sur un superbe étal de pommes, jus de pomme et cidre. Je suis bien en Normandie. Je demande mon chemin à deux dames. C’est très simple. Tout droit, sortir du village puis route à droite dans la forêt pour La Valnaye. 2e gite à gauche.

Premier gîte La Valnaye avec beaucoup de monde et beaucoup de bruit. Serait-ce un retour de noces du dimanche soir ? Mon gîte est plus loin, plus haut, plus au calme juste avant le GR2 en forêt. Je retrouve enfin la marque du GR que je n’ai pas suivi depuis Rouen.

Pas de panneau mais le numéro de la rue et la maison correspondent à la photo que j’ai reçue. Je demande à deux dames qui promènent leur chien. C’est bien là. Elles m’expliquent l’entrée. C’est ouvert. Avec des tranches de saucisson, des tomates, du pain, des noix et noisettes, un morceau de Toblerone (souvenir de ma randonnée en Suisse en juillet dernier) et des gavottes de Dinan en Bretagne, le biscuit à la pâte la plus fine au monde (la vraie recette, nature, sans enrobage de chocolat). Avec une boite de la Belle Iloise et une pomme tirées de mon sac à dos, cela se complète bien. Vu ce que je vois dans le réfrigérateur, le petit déjeuner de demain matin s’annonce très bien.

Pas de télévision. Je suivrai le quart de finale France - Afrique du Sud de la coupe du monde de rugby comme je le pourrai. Ma mère et un neveu m’ont tenu informé du score toute la soirée. Un livre dans ma chambre. Pas une Bible comme dans les motels d’Amérique du Nord mais le volume de la collection Bouquins chez Robert Laffont consacré à Sylvain Tesson, « L’énergie vagabonde ». Excellente lecture pour un marcheur. Douche à l’italienne très appréciable après une après-midi de marche.

En chemin vers Duclair

En chemin vers Duclair

Lundi 16 octobre : Saint Pierre de Maneville – Duclair

Départ : 9h15

Arrivée : 18h15

Chambre d'hôtes En bord de Seine à Duclair

L’échec du XV de France dans sa Coupe du monde de rugby à domicile ne m’a pas empêché de dormir comme un loir. De la chambre, vue sur la forêt. De la salle de bains, vue sur la campagne. Réveil à 6h30. Petit déjeuner à 7h30 avec du pain frais, du miel local, des confitures maison, des viennoiseries fraîches, du jambon, du fromage, du thé, une banane et des myrtilles. Parfait avant de démarrer une journée de marche. Le meilleur petit déjeuner de mes 6 jours de randonnée.

Je suis tellement bien ici que je n’arrive pas à décoller. D’abord je découvre qu’il y a la wi fi alors que je ne l’ai pas trouvé hier soir. Faute d’attention de ma part. Ensuite, je crois avoir perdu mon billet de train retour Le Havre – Paris. J’ai toujours une version imprimée dans le sac à dos en cas de panne de réseau ou du téléphone. Pauline, la maitresse de maison, me l’imprime après que je lui ai transféré. Je l’ai retrouvé le jour même en fouillant mieux mon sac à dos. Je laisse un mot élogieux sur le livre d’or du gîte ouvert en juin 2023, sur Booking et sur ce blog. Je recommande vivement la Folie douce à Saint Pierre de Manneville.

Finalement, je démarre à 9h15. Le GR2 est visible 100m au-dessus de la maison. Il commence par un sentier en forêt. Il fait 5°C mais j’ai quatre couches de vêtements sur mon torse dont un coupe-vent bien utile avec ce vent frais, vent du matin comme dit la chanson de marche.

Temps sec et ensoleillé. Longue montée dans la forêt domaniale de Ramoure. Il y a du dénivelé comme m’avait prévenu mon ami C.

Je sors de la forêt vers 12h30 pour arriver devant l’église abbatiale Saint Georges à Saint Martin de Boscherville. Un chef d’œuvre roman du XII° siècle. Une merveille de lumière. Une bougie pour le repos des âmes de mon père et de mon frère. Le curé est trop beau gosse pour rester chaste et célibataire à mon avis. Ou alors c’est un Saint. Pique-nique sur un banc du jardin face à l’église.

Ensuite, retour en forêt sur les crêtes, à couvert vers Henouville. A l’arrivée à Henouville, je repère un magnifique panneau routier : Danger. Présence de randonneurs ! Je n’ai pas eu la présence d’esprit de demander à une promeneuse de me photographier devant. Photo tout de même du panneau.

D’Henouville, 8km de départementale pour Duclair. Je retourne sur le GR2 en forêt sur la crête mais avec enfin des vues panoramiques sur la Seine. L’effort est récompensé par des vues splendides.

En forêt de Roumare, j’ai croisé des classes découvertes en forêt de petits enfants et d’adolescents ainsi que des retraités en pleine marche de maintien en forme. Cette fois, alors que je descends vers la Seine, je croise un groupe d’ados qui monte vaillamment, munis de bâtons mais sans sac.

Arrivé en bas à Henouville, Duclair est à 4km tout droit par la départementale mais le GR2 me fait remonter en forêt jusqu’à Saint Pierre. A Saint Pierre, je vois que le GR2 fait encore de sacrés détours pour arriver à Duclair. J’en ai marre et suis les bas-côtés larges et herbus de la départementale.

Comme l’herbe est épaisse, les déchets ne se voient pas mais il y en a tous les 10m sans exagération : bouteilles de verre, en plastique, canettes métalliques, emballages plastiques, masques jetables pour COVID. Les automobilistes sont des porcs et personne ne ramasse. Trop dangereux pour emmener les enfants en sortie écologie. Je le vois partout en France, sur les bords de route, quel que soit le département, quelle que soit la région. Pas assez d’éducation ni de sanction apparemment. Espérons que la jeune garde soit plus respectueuse de l’environnement. Je n’ai jamais jeté de déchet non biodégradable dans la Nature. Mes parents me l’ont appris dès les années 70.

Arrivée à Duclair où le GPS m’emmène sur les quais de la Seine. Logique pour un gîte en bord de Seine. Je pars d’abord dans le mauvais sens, vers Rouen. Puis je comprends le GPS et repars dans le bon sens vers Le Havre. Le GPS m’envoie en hauteur sur la route du Havre puis m’affirme que je suis arrivé alors qu’il n’y a rien. J’appelle le gîte et apprends que le GPS m’a enduit dans l’erreur. Comme son nom l’indique, le gîte est en bord de Seine.

Heureusement, je peux traverser le parc du restaurant le Parc pour descendre à la Seine. Le menu est alléchant mais je n’y goûterai pas car un banquet privé est organisé ce soir.

Gîte charmant. Une grande maison avec une grande cheminée où brûle un grand feu de bois. Entrée extérieur pour mon gîte par un escalier jusqu’au premier étage. C’est tout rose, tout cosy,  tout mignon avec vue sur Seine de la chambre et une grande salle de bains.

Pas de table d’hôtes mais plusieurs restaurants à Duclair. Sauf qu’ils sont tous fermés le lundi 16 octobre même le restaurant berbère marocain où les tables sont dressées et où je rêvais de manger un tajine agneau fruits secs comme je l’ai déjà fait en Bourgogne, dans l’Yonne, au Nord d’Auxerre.

Il reste une pizzeria ouverte. Plutôt à emporter mais je peux manger sur place une sicilienne avec câpres, oignons, anchois. Une canette d’eau gazeuse italienne que je ne jette pas dans la Seine. Mangue séchée et pomme tirée du sac pour me nettoyer la bouche.

Ce soir, TV dans ma chambre mais, comme il n’y a plus de match de rugby, peu m’importe. Longue et dure marche mais en forêt, au calme, avec de belles vues sur la Seine à la fin.

Vue sur la Seine

Vue sur la Seine

Mardi 17 octobre :  Duclair – Rives en Seine

Départ : 9h15

Arrivée : 16h15

Gite Saule en Seine à Rives Seine

Bien dormi. Petit déjeuner convenable mais moins bon que la veille. Pas de miel, jambon et fromage. Pain sec, yaourt industriel. En compensation, feu de bois dans la cheminée. Beaucoup plus cher aussi que la veille (100€). Je paie le cadre. C’était propre, confortable et j’ai bien dormi.

Le GR2 ne passe pas par Jumièges. Je fais donc un détour pour voir cette abbaye surnommée la plus belle ruine de France.

Le patron du gîte m’explique le chemin. Très simple. Au sortir de la maison, prendre à gauche et suivre la Seine jusqu’au bac de Jumièges. Puis virage à 45°C et route de Jumièges en passant devant le manoir d’Agnès Sorel et le golf.

Je suis la route qui longe la Seine par ses bas-côtés herbeux. C’est bien moins fréquenté que la départementale donc pas de déchets dans l’herbe. Arrivé au bac, je vois une véloroute pour Jumièges à 10km. 8 km par la route. 2km à pied, ça compte.

Je suis donc la route et tombe sur le manoir où est morte Agnès Sorel (1422-1450), maîtresse du Roi de France Charles VII, morte d’un 4e accouchement et d’un empoisonnement au mercure. Tout est expliqué sur place en accès libre. Magnifique manoir de l’an 1325 environ, résidence de campagne des abbés de Jumièges.

Je poursuis ma route et arrive tranquillement à l’abbaye de Jumièges pour 12h30. Il fait beau et je me restaure sur un banc face à l’abbaye. Je m’apprête à visiter pour apprendre, qu’hors saison, l’abbaye est fermée entre 13h et 14h30. Trop long pour moi qui ait encore du chemin à faire. Je me contenterai donc de voir l’abbaye de Jumièges de l’extérieur.

Je prends la route de Caudebec en Caux et vois la croix de Saint André du GR. Pas par-là donc. Je trouve la balise du GR et la suit tout content de me retrouver seul en forêt, loin de la route et des voitures.

Un doute m’étreint. Suis-je bien sur le GR2 ou sur une variante ? Examen de la carte IGN. Je suis sur le GR23A qui rejoint le GR2 après des kilomètres au Nord Est alors que je vais au Nord Ouest vers Rives Seine.

Demi-tour et retour en ville à la route de Caudebec en Caux et à la croix de Saint André du GR. Il est 14h. J’ai perdu 1h en marchant.

Je suis la route et le trajet du bus 530. Comme la veille, les arrêts de bus me permettent de mesurer précisément ma progression.

Je passe Yainville et arrive au Trait où passe le GR2. Pas trouvé trace du GR2 ni à l’église, ni à la mairie. Il doit passer plus haut, en forêt. Je poursuis la route de Caudebec en Caux et tombe sur une voie verte, la Seine à vélo , que je vois depuis Rouen.

Une piste cyclable c’est mieux que la route pour un marcheur. Je demande à un lycéen qui passe avec le casque audio sur la tête. Il enlève le casque et me confirme que je suis bien dans la bonne direction, vers Saint Wandrille.

Je me pose sur un banc et appelle le patron du gîte. Il me confirme que je suis sur le bon chemin, que la voie verte, ancienne voie ferrée reconvertie, est à 50m de son gîte.

Il me propose de venir me chercher en voiture à un carrefour. Effectivement, je le trouve à un croisement voie verte – route.

En moins de 5mn, nous sommes arrivés. Gite construit en cabane autour d’un saule, d’où son nom Saule en Seine. Tout confort mais rien à manger. Ni dîner ni petit déjeuner. Pour le dîner, je me ferai livrer. Pour le petit déjeuner, pause à Caudebec en Caux demain matin.

Tv, wifi, belle douche avec carreaux de mosaïque. Je reçois deux prospectus pour un burger et une pizzeria. Le burger est fermé le mardi et nous sommes le mardi 17 octobre. Une pizzeria ouverte 7/7. J’ai appelé 5 fois entre 19h et 19h45. A chaque fois, je suis tombé sur le répondeur indiquant que Pizza King est fermé dimanche 9 juillet et ouvrira lundi 10 juillet. Nous sommes le mardi 17 octobre. Rien à ajouter.

Il me reste dans le sac un saucisson sec et des fromages de chèvre secs d’Auvergne achetés samedi 14 octobre à mon marché à Paris chez un Auvergnat qui est aussi randonneur. Produits efficaces. J’ai des pommes grâce au pommier croisé sur la route en sortant de Jumièges cet après-midi. Ainsi que des tranches d’ananas séché achetées dans une boutique parisienne de fruits et légumes secs. Et de l’eau. Protéines animales, vitamines, sucre, eau. J’ai de quoi tenir.

Entrée de Caudebec en Caux

Entrée de Caudebec en Caux

 

Mercredi 18 octobre : Rives Seine - Lillebonne

Départ : 9h30

Arrivée : 16h40

Hôtel de France à Lillebonne

Au matin, l’hôtesse passe me voir. Je lui explique que je n’ai rien trouvé à manger hier soir faute de réponse des livreurs. Elle est désolée pour moi et me dit que j’aurais dû l’appeler, qu’ils auraient trouvé une solution. J’ai été trop timide.

En tout cas, à 2500m du gîte, il existe des boulangeries et des cafés à Caudebec en Caux. J’ai pris un thé chaud au gîte ce matin. Je pars par une petite route tranquille. Arrivé à Caudebec en Caux, je trouve une brasserie qui ne sert qu’à boire, rien à manger. Pas de sandwich mais je peux amener le mien m’explique le serveur. Une brasserie avec bière mais sans sandwich. Le commissaire Maigret doit s’en retourner dans sa tombe.

Je trouve une boulangerie un peu plus loin, achète une fougasse aux pommes de terre et aux lardons que je fais réchauffer, un pain aux raisins et une baguette à l’épeautre pour ce midi.

Il est tombé des cordes à 6h du matin mais il ne pleut plus.

Je reviens à la brasserie, mange ma fougasse chaude et mon pain aux raisins et boit un soda noir américain.

En quittant la ville je trouve sur la gauche la balise du GR2 qui me fait monter en forêt (avec peu de vue sur la Seine) puis redescendre à la Seine à Villequier où se noya Léopoldine Hugo d’où le bouleversant poème de son père, Victor Hugo («  Demain, dès l’aube ») racontant sa marche pour aller fleurir la tombe de sa fille. Je suis les pas de Victor Hugo dans une hêtraie magnifique (le plus beau kilomètre de France selon le Touring Club de France, en 1957).

A Villequier, je longe la Seine et admire la maison Vacquerie (Auguste Vacquerie, natif de Villequier, beau-frère et ami de Victor Hugo. Son exécuteur testamentaire) devenue Musée Victor Hugo. Comme l’abbaye de Jumièges, hors saison, elle est fermée pour pause méridienne.

Au bout du quai, j’ai perdu le GR. J’ai dû manquer une balise. Je suis donc la D81. Pluie et vent. Je m’abrite sous l’auvent du toit d’un brocanteur qui me semble fermé. Pas tout à fait car le brocanteur me voit et ouvre sa porte. Il me demande gentiment ce que je fais là. Je lui explique.

C’est un marcheur. Il a fait le GR34 cet été de Saint Brieuc à Saint Malo et a souffert du dénivelé. Il m’explique qu’il tient une entreprise de sécurité incendie, fait brocanteur en complément 2 week end sur 3. Deux week end à suivre pour s’adapter aux couples séparés en garde alternée. Ainsi le père peut être son client un week end et la mère sa cliente le week end suivant. Avec un week end sur deux, son système précédent, il ne pouvait voir que le père ou que la mère. Astucieux. Il m’aide à mettre mon poncho de pluie au-dessus du sac, m’indique la route pour Lillebonne et je repars.

Pluie et vent le long de la D81. Pas drôle.

Je repère l’arrêt de bus de la ligne Caudebec en Caux –Le Havre qui s’arrête à Lillebonne. Parfait mais les horaires affichés datent de la saison 2016 -2017 alors que nous sommes en 2023. Sont-ils encore valables ?

Pour le savoir, je m’installe en face, sous l’abribus, dans le sens Le Havre – Caudebec en Caux, mange mon pique-nique et consulte les horaires sur Internet.

Le temps de faire tout cela, le bus passe devant moi sans s’arrêter, filant vers Le Havre, puisque je suis dans l’autre sens. Grave erreur de jugement que je paie cash.

Je dois continuer de marcher dans les bas-côtés, herbeux, épais et humides de la D81 sous la pluie et le vent. J’en sors à Norville. Je repère un hôtel café restaurant. Je me pose à l’abri de la terrasse alors qu’il pleut toujours. Je demande de l’eau pour ma gourde à la patronne. C’est une mamie dynamique qui porte Loulou sur son épaule droite. Loulou est un superbe perroquet blanc. Muet. Attaché à sa maîtresse qui remplit ma gourde avec un perroquet sur son épaule.

La dame m’indique le bus devant la mairie. Il est 14h45 et le prochain est à 17h. Je n’ai pas envie d’attendre 2h au bar en discutant avec Loulou et sa maîtresse.

Je marche toujours sur la D81 en direction de Lillebonne. La ville est bien indiquée mais pas le kilométrage. Je longe les énormes raffineries de pétrole de Port Jérôme Seine, signe que je me rapproche du Havre.

Je marche face aux voitures sur le bas-côté herbeux face aux voitures ne sachant pas combien de kilomètres il me reste à parcourir. Une voiture s’arrête de l’autre côté de la route. Le conducteur ouvre sa fenêtre et me demande si je veux monter à bord. J’accepte, traverse la route en regardant bien les voitures et H. me conduit gentiment juste devant l’hôtel de France à Lillebonne. Il connaît le patron et me recommande l’hôtel.

Je lui explique ma marche de Paris à Rome et ce blog de randonnée. Ca lui plaît beaucoup. Il se prend en photo avec moi et mémorise le blog sur son téléphone. Au vu des actualités anxiogènes du moment (guerre à Gaza, attentats) être recueilli par un jeune Maghrébin barbu bienveillant fait du bien au moral. Nous n’avons parlé ni de religion ni de politique ni de travail.

A l’hôtel, je fais le code, prends ma clef et ouvre ma chambre. Hôtel ancien, propre mais une prise électrique est hors service et il n’y a plus de patère sur la porte de la salle de bains pour accrocher la serviette. Ca doit être réparé me dira le réceptionniste.

Achat du Canard enchaîné à la Maison de la presse qui ne fait pas de cartes postales locales.

Visite de l’église Notre Dame de Lillebonne (superbe gothique finissant) où une paroissienne zélée éteint la lumière et manque de m’enfermer. Il est écrit d’être discret dans l’église. Je suis discret dans l’église.

Dîner au restaurant Angus de l’hôtel de France. Mon premier vrai dîner de cette randonnée en Normandie. Jusqu’ici, j’ai bricolé. Là, c’est du sérieux. Jus de pomme. Salade de betteraves au vinaigre balsamique. Confit de canard sauce moutarde, petits légumes et frites. Tarte Tatin avec crème fraîche et éclats de noisettes. Verre de fine calvados. Bonne musique lounge mais pas seulement. Je me suis régalé.

Je sèche mes chaussures avec des vieux journaux que m’a donné le réceptionniste. Il note le truc qu’il ne connaissait pas. En me servant le dîner, il me dit qu’il l’a déjà transmis à un ami. Voici le truc: enlever la semelle pour qu'elle sèche à part, bourrer la chaussure de vieux journaux papier (pas du papier magazine), de la pointe jusqu'au bord. Laisser ainsi toute la nuit. Au matin, avant de remettre les chaussures de marche, enlever les journaux et les jeter. Les journaux sont trempés. Les chaussures sont sèches.

Trop de vent pour laisser la fenêtre ouverte. Dommage car mes vêtements trempés de sueur et de pluie sèchent dans la chambre.

En chemin vers Saint Laurent de Brévédent

En chemin vers Saint Laurent de Brévédent

Jeudi 19 octobre : Lillebonne – Saint Laurent de Brévédent

Départ : 9h30

Arrivée : 18h

Gîte les Sous-Bois à Saint Laurent de Brévédent

Petit déjeuner correct mais rien de mémorable contrairement au dîner de la veille. Je sors de Lillebonne et trouve immédiatement le théâtre gallo-romain de Lillebonne, le mieux conservé au Nord de la Loire.

Ensuite, en marchant au hasard, je trouve la marque du GR2. Dans la bonne direction. Il monte en forêt, traverse des champs (merci aux propriétaires. J’ai soigneusement refermé les barrières après mon message pour éviter que les vaches ne divaguent) et arrive à Saint Nicolas de la Taille.

De là, selon la carte IGN, le GR2 me permet d’aller à Saint Laurent de Brévédent. Ce n’est pas ce qu’affirme la carte devant la mairie de Saint Laurent de Brévédent. Je choisis donc la D81, celle d’hier, et la suit 10km jusqu’à Saint Romain de Cosbol. Je trouve un café, bois un verre de soda noir américain et le patron remplit ma gourde d’eau fraîche.

Temps couvert mais il ne pleut pas. A la sortie du village, un homme me hèle de sa fenêtre et m’indique une route pour Saint Laurent avec moins de voitures que celle pour Le Havre.

Conseil avisé. J’ai d’abord pris une première route qui aboutit à un chemin en impasse. Demi-tour. Je reprends la petite départementale et aboutit à un rond-point où Saint Laurent de Brévédent est annoncé à 8km. Je n’ai plus qu’à la suivre.

Hier, en chemin, j’ai vu un castor écrabouillé en bord de départementale. Aujourd’hui un faon mort, percuté par une voiture probablement.

Pour les 5 derniers kilomètres, la pluie se déchaîne. J’arrive au village, trouve un abri et réussit de nouveau à joindre la patronne du gîte au téléphone. Elle me répond qu’elle m’a tout expliqué sur booking. Je lui réponds que je n’ai pas accès à Booking en randonnée.

Je suis passé devant son gîte sans le savoir. Aucun panneau indicateur en bord de route. J’avais pourtant flairé le piège mais n’avais pas été voir le hameau isolé avant le bourg. Tout est de ma faute donc.

La patronne comprend que je suis fatigué et trempé et viens me chercher en voiture.

Gîte immense avec un grand jardin, des couloirs, des chambres, un salon de billard, une salle de sport, un sauna. Salle de bains commune à chaque étage. Cuisine collective au premier étage. Je me fais livrer ma pizza. Cette fois, ça marche, contrairement à Rives Seine.

Le livreur entre dans la maison. Grande chambre cosy, confortable avec vue sur le jardin. Je vais bien dormir, bercé par la pluie. J’ai réservé le restaurant de poissons au port de plaisance du Havre pour demain 13h.

Aujourd’hui, je n’ai croisé personne en chemin. Belles vues au loin sur le pont de Tancarville. Je m’éloigne de la Seine. Demain, j’arrive à la Mer, à la Manche, version Normandie.

Piscine du Club Nautique Havrais. Réservée aux mouettes. For gulls only.

Piscine du Club Nautique Havrais. Réservée aux mouettes. For gulls only.

Vendredi 20 octobre : Saint Laurent de Brévédent – Le Havre

Départ : 9h

Arrivée : 11h30

Restaurant la Voile bleue au Havre

 

Bon petit déjeuner en libre-service. Je ne vois pas l’hôtesse mais j’ai payé mon séjour sur Booking. Je pars vers 9h et retrouve la D31 vers Saint Laurent de Brévédent puis Harfleur.

A Harfleur, grand panneau de direction pour le Havre. C’est une 4 voies donc impraticable à pied. Je pourrai chercher mon chemin mais j’ai hâte d’arriver.

Je trouve un bus qui m’emmène au Havre. La chauffeuse est une belle jeune femme souriante, efficace, prévenante qui m’explique mon chemin, comment acheter mon billet (je l’ai payé) et l’avertir avant de s’arrêter devant l’hôtel de ville du Havre.

Là, coup de chance, c’est jour de marché. J’en profite pour acheter de vrais fromages normands du cru au lait cru : les 4 AOP camembert, livarot, pont l’évêque, neufchâtel, et, plus confidentiels, le crémeux du Mont Saint Michel, l'oreiller à la ciboulette, un chèvre cendré de Seine Maritime. Tout entre dans le sac à dos.

Je suis le GPS qui m’emmène au restaurant la Voile bleue où j’ai réservé pour 13h. il est 12h15. L’ardoise dehors indique des mets alléchants mais j’ai le temps. Je vais admirer le centre nautique Paul Vatine, la superbe piscine découverte du Club nautique havrais (fermée aux humains et occupée par les mouettes que je jalouse). A côté, une belle plage de galets où j’admire la Mer, les voiliers, les cargos et respire à pleins poumons l’air du large.

Je vais ensuite déjeuner somptueusement. Repas de fin de randonnée plus cher qu’à Aoste en juillet 2023 avec tartare de merlan en entrée, sole entière avec pommes grenaille et petits légumes en plat, thé gourmand en dessert. Jus de pomme artisanal mais pas de Normandie. Cidre industriel dont je me suis abstenu.

Pour digérer, je vais à la plage. Il y a du vent et du soleil. Nous sommes le vendredi 20 octobre 2023. Il fait frais mais pas froid. Je me déshabille et vais me baigner de 15h à 15h30 puis de 16h à 16h30. Je me fais photographier par une voisine en doudoune. Je suis le seul en maillot et le seul à me baigner. Je suis un privilégié.

Thalassothérapie normande avec projection dans les galets par les vagues. Excellent massage après 6 jours de marche. Mes sinus sont bien nettoyés.

Passage ensuite juste en face à l’office du tourisme du Havre où j’achète des cartes postales touristiques et pittoresques que j’écrirai et posterai à Paris.

Je signale à l’hôtesse qu’il est dommage que le seul topoguide du GR2 couvre la seule région Ile de France de Montereau fault sur Yonne (77) à Vernon (27) , grâce au soutien du conseil régional d’Ile de France, alors que ce GR se poursuit et se finit en Normandie de Vernon (27) au Havre (76) en passant par Rouen (76). Elle m’a dit qu’elle ferait part de ma remarque à sa hiérarchie.

Le GR2 est bien balisé en Normandie mais un guide serait un plus pour promouvoir ce chemin. Même remarque pour la Bourgogne Franche-Comté car il n’y a pas de guide du GR2 de Dijon, son point de départ (21) à Montereau fault sur Yonne (77).

Retour sans encombre à Paris. J’ai loupé le croisement du GR2 et du GR21 (côtes de Normandie) qui se trouve quelque part devant la gare routière du Havre.  J’ai aussi manqué les voiliers de la transat Jacques Vabre Le Havre – Fort de France. Je croyais les trouver à la base nautique Paul Vatine près du restaurant et de la plage. Ils étaient aux Docks du Havre.

Le train Nomad est confortable et bien moins cher que le TGV (moins cher en 1ère qu’une 2nde Paris-Rennes). Vu la distance, une ligne grande vitesse Paris – Le Havre ne me semble pas indispensable mais il est possible que les Normands aient un autre avis sur le sujet.

En déballant mon sac à dos à Paris, j’y trouve tout y compris une surprise, un galet de la plage du Havre que j’ai ramené à Paris sans le savoir.

J'ai donc terminé le GR2 sentier de la Seine. Après avoir remonté la Seine jusqu'à sa source de Paris à Dijon en passant par Auxerre, je l'ai descendue de Paris au Havre en passant par Vernon et Rouen. C'est un axe économique majeur pour la France depuis le XII° siècle et il vaut l'effort.

A part les falaises de la Seine avec certains passages abrupts, rien de difficile sur ce chemin. La mise au vert est très rapide, surtout en descendant avec la Seine avec les bois de Meudon et de la Malmaison. Pour retrouver les ciels des Impressionnistes, il suffit de suivre le GR2 de Paris au Havre via Vernon et Le Havre. Dans l'autre sens, vers Dijon, tremper mes pieds à la source de la Seine fut un grand bonheur sur mon chemin de marcheur.

Prochains objectifs: poursuivre mon chemin vers Rome par la Via Francigena en Italie depuis Aoste. En France, poursuivre le GR14 sentier des Ardennes de Paris à la Belgique. Le prochain article de ce blog racontera la première partie de ce chemin en Ile de France, de Paris à Coulommiers en Brie.

Les photographies de cet article sont l'oeuvre de Guillaume Lagrée. Toute utilisation de ces images sans autorisation de leur auteur constitue une violation du Code de la propriété intellectuelle passible de sanctions civiles et pénales.

Base nautique et plage du Havre

Base nautique et plage du Havre

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