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Paris - Rome VIe Partie. Nyon (CH) - Aoste (I). De la Suisse à l'Italie. Le passage des Alpes

10 Août 2023 , Rédigé par Guillaume Lagrée

en montant vers le col du Grand Saint Bernard

en montant vers le col du Grand Saint Bernard

Paris- Rome

VIe partie

Le passage des Alpes

De la Suisse à l’Italie

Sur les pas de Napoléon Bonaparte

Nyon (CH) – Aoste (I)

11 jours de marche

Dimanche 9 – mercredi 19 juillet 2023.

Guide Via Francigena de Cantorbery (UK) au col du Grand Saint Bernard (CH)

Guide Via Francigena depuis le col du Grand Saint Bernard (CH) jusqu'à Rome (I)

ou

Guide Via Francigena du Grand Saint Bernard (CH) à Rome (I).

Suivre les flèches jaunes du tourisme pédestre en Suisse

 

Dimanche 9 juillet : Paris- Nyon – Saint Prex

Chambre d'hôtes Aux 4 saisons à Saint Prex. 

22km.

L’étape peut se faire en train avec les CFF  ( Chemins de Fer Fédéraux) ou en bateau avec la CGN ( Compagnie Générale de Navigation).

Départ à pied de la gare de Nyon à 12h30

Arrivée à 19h15 à Saint Prex.

En juillet 2022, j’étais passé de France en Suisse en franchissant le Jura pour terminer à Nyon, canton de Vaud, face au Lac Léman et aux Alpes.

En juillet 2023, je pars de Nyon pour franchir les Alpes et arriver en Italie à Aoste.

Réveil avant 6h. Je vide le réfrigérateur, coupe l’eau et l’électricité. Je ferme tout et boucle le sac. TGV Lyria Paris gare de Lyon –Genève Cornavin. Départ à 8h18 du train. Au passage à Sarry (89), au croisement des lignes grande vitesse Alpes et Méditerranée, je salue ma tante F chez qui j’ai logé en juillet 2021 lors de ma traversée de la Bourgogne à pied d’Auxerre à Dole.

J’ai 20mn de battement à Genève pour prendre le train des CFF pour Vevey qui s’arrête à Nyon. Dans mon compartiment de 1ère, une colonie de vacances. Le chef des animateurs est un expert. Pas un éclat de voix de Paris à Bellegarde (01) où tout le monde descend en ordre avec les valises, les sacs et un seau de balles de tennis. Le groupe est compté un par un sur le quai de la gare. J’ai été animateur de centre de vacances il y a 30 ans. Je parie que les enfants vont passer de superbes vacances. Je m’en porte garant pour les parents.

Le TGV Lyria France – Suisse est à l’heure française. Arrivée prévue à 11h30 à Genève Cornavin, effective à 11h45 sachant que mon train pour Nyon part à 11h50. J’ai eu ma correspondance. Je descends du train à Nyon, cherche, quand une voix de femme appelle « Guillaume ! ».

C’est L, une amie d’enfance qui vit en Suisse depuis 25 ans. Nous ne nous sommes pas vus depuis 25 ans. J’ai déjeuné avec sa mère chez ma mère début mai. Quand j’ai expliqué mon parcours de cet été, elle m’a expliqué que sa fille vit à côté et donné ses coordonnées. Je l’ai contacté et L. est au rendez-vous.

Nous marchons ensemble le long du lac Léman de Nyon à Rolle, le village de Jean-Luc Godard. Nous trouvons un banc à l’ombre, avec poubelle, face au lac pour le pique-nique. J’ai des terrines de poisson de la Belle Iloise et des fruits secs. Elle a du pain, des fruits et légumes frais. Bon échange.

Nous marchons à partir de 13h30 en pleine canicule. Soit sur un sentier boisé le long du lac soit sur la piste cyclable le long de la route fédérale Genève – Lausanne. Plus direct par la route mais moins d’ombre et vue moins belle. Nous nous racontons 25 ans de vie en marchant. C’est bien mieux qu’une discussion par écran ou au téléphone. Généreusement, L. m’offre quelques pièces suisses et un panier d’abricots du canton de Vaud acheté à un distributeur automatique à l’entrée d’une ferme le long de la route.

Arrivés à Rolle, L. reprend le train pour rentrer chez elle. Pause rafraîchissement aux fontaines. Je reprends mon chemin seul. Je commence à fatiguer. Il est 19h et je ne suis pas encore arrivé à Saint Prex. Pause à Allaman Plage, près du restaurant de plage. J’appelle mes hôtes qui commençaient à s’inquiéter de mon sort. Ils proposent de venir me chercher en voiture. J’accepte car même si j’ai de quoi manger et boire mes jambes sont lourdes et ma motivation éteinte.

Accueil adorable par un couple de sexagénaires très sympathique, Claire-Lise et Jean-Luc. Je suis comme chez une tante de province en France. En Suisse, on ne soupe pas tard. Je prendrai ma douche après le repas. J’enlève mes chaussures de marche, me lave les mains et savoure une tarte au thon et à la tomate. Une salade verte. Une bavaroise aux fruits rouges. Pas de fromage. Tomates, salade et fruits rouges viennent de leur jardin. Jus de pomme de la ferme voisine. Salle de bains familiale avec grande douche. Je dors dans une chambre de leurs enfants. Vue magnifique sur les Alpes françaises, sans le Mont Blanc, depuis leur salon.

Petit déjeuner à 7h30. Pas de carte bleue mais Jean-Yves m’emmènera le matin retirer de l’argent au Bancomat de Saint Prex. Saint Prex qui a inspiré à Jean-Jacques Rousseau le nom du chevalier de Saint Preux dans La Nouvelle Héloïse. Des scènes du roman se déroulent dans le village. De ma fenêtre ouverte sur la nuit étoilée, j’entends le pas d’un cheval sur le chemin. Magique.

 

Lundi 10 juillet : Saint Prex – Lausanne. 16km.

L’étape peut se faire en train avec les CFF ou en bateau avec la CGN.

Départ : 9h

Arrivée : 15h

Auberge de jeunesse internationale de Lausanne. 

Fabuleux petit déjeuner. Le meilleur de tout le parcours et de loin. Thé à la menthe fraîche du jardin. Jus de pomme fermier. Fromages suisses. Yaourts suisses aux fruits. Brioche et confitures maison. Miel de montagne. Pain frais maison du four. Jambon italien. Fruits frais. Jean-Yves m’emmène en voiture à Saint Prex, à la banque cantonale vaudoise, retirer de l’argent suisse. Je règle mes 90CHF pour la nuit en ½ pension. Pas volé vu la qualité de l’accueil. Il est prêt à m’emmener en voiture jusqu’au sentier du lac mais je me débrouille en suivant, comme la veille, la piste cyclable le long de la route Genève- Lausanne.

Il m’a indiqué un sentier le long de la voie ferrée. De la route, je vois le chemin de fer et un chemin d’accès. Effectivement, je trouve un sentier en sous-bois ce qui est bien plus agréable que de longer la route au soleil. J’entends les voitures, les trains mais ne vois ni les uns ni les autres. Je trouve le sentier de la truite qui longe le lac Léman pour arriver à Morges. En sous-bois, avec ruisseau, débouchant sur le lac Léman hors plage et villa. Superbe. Marche le long d’une longue plage puis je retrouve la route pour Lausanne & la piste cyclable parfois à l’ombre. Les lignes de bus me fournissent des abris réguliers et me permettent de mesurer ma progression.

Vers 13h, pique-nique à l’ombre d’un muret face à la route. Enfin le chemin me ramène au lac Léman. Je trouve vite une fontaine pour remplir ma gourde. Par principe, je demande à un homme qui se sert si elle est potable. « Vous êtes en Suisse. Elle est très bien filtrée. Il va rien vous arriver. On n’est ni en Espagne, ni en Italie, ni en France. ». Voilà, c’est dit. Un cycliste me dépasse et voyant le drapeau français qui dépasse de mon sac à dos me gentiment : « Bonjour, la France ! ».

Je marche le long du lac. Au loin, une réplique de bateau de guerre du XVIe siècle (époque où des pirates sévissaient sur le lac). Devant moi, un séchoir à poisson en plein air. C’est écrit sur la maison : « Poisson et pêcheur sauvages du Lac ». Je n'ai pas goûté le poisson.

Je dépasse le parc archéologique de Lausanne Vidy (traces visibles de la Lausanne gallo-romaine. Ier-IVe siècle après J.C). J’appelle l’auberge de jeunesse de Lausanne où je dois loger ce soir. J’apprends que je suis allé trop loin. ½ tour vers Genève. Je ne trouve pas, rappelle mais le portable ne passe plus. Par contre, Google Maps fonctionne et m’amène à bon port. L’auberge de jeunesse est à côté du musée romain de Lausanne Vidy. Je suis bien en marche vers Rome.

A l’auberge de jeunesse de Lausanne, pour la première fois depuis mon départ de Paris en mars 2019, je fais tamponner ma crédence puisque c’est à Lausanne que je trouve la Via Francigena (chemin des Francs), sentier des pèlerins vers Rome. Je reçois le tampon Compostelle mais c’est le principe.

Je réussis à obtenir la wi fi, à faire une première lessive dans une machine à laver qui fonctionne avec des pièces suisses (merci encore à L qui m’en a offert la veille). Pas de séchoir à linge mais, vu la chaleur, je fais sécher mon linge sur une rambarde. Trop fatigué pour aller me baigner dans le lac. Je ne bouge plus et soupe ici ce soir.

J’ai pris ce matin une banane de Guadeloupe & Martinique achetée sur France par mes hôtes. Elle s’est écrasée dans le sac mais je la mange quand même. Sauf à disposer d’un récipient léger et protecteur, ne jamais mettre une banane dans un sac à dos.

Dîner en self-service. Gaspacho délicieux. Couscous végétarien moyen. Tartelette sans plus.

Un peu de repos le soir sur la chaise longue au jardin mais les oiseaux sont très bruyants.

Nuit difficile. Peu et mal dormi. Chambre monacale mais pas fraîche. Fenêtre avec une ouverture minime. Pas de climatisation, principe qui me convient. Fenêtre fermée, j’étouffe. Ouverte, j’étouffe aussi mais avec un peu plus d’air. Air qui reste très chaud sans orage.

 

Mardi 11 juillet : Lausanne – Vevey. 22km.

L’étape peut se faire en train avec les CFF ou en bateau avec la CGN .

Départ :7h20

Arrivée : 11h30

Hôtel Abaca à Vevey.

Déjeuner à 6h30. Horaire pour randonneurs. Pas aussi fabuleux qu’à Saint Prex mais très correct. Ice tea maison. Eau fraîche infusée avec orange, menthe et citron.

Départ à 7h20. Je trouve facilement le chemin, traverse de nouveau le parc archéologique gallo-romain et arrive au port de Lausanne Ouchy. Magnifique. Grands bateaux, grands hôtels et belles fontaines. Je bois sans entamer la gourde.

Ensuite sentier du lac. Magnifique et facile. Point de vue somptueux. Bancs. Fontaines d’eau potable. Là, tout n’est qu’ordre et beauté, luxe, calme et volupté (Charles Baudelaire). Tout invite au repos et à l’admiration. J’avance tout de même en longeant de belles plages sans me baigner. Le chemin finit par remonter sur les coteaux du Lavaux, patrimoine mondial de l’humanité, dans le vignoble avec vue sur le lac et les Alpes. Plein cagnard. Je m’abreuve aux points d’eau dans les vignobles. Halte CFF à Villeneuve. Je ne vois pas où prendre un billet de train. Respectueux du règlement, je poursuis mon chemin et arrive à Cully, village vigneron où a lieu un festival de Jazz au printemps.

Cf extrait audio au dessus de cet article avec Richard Galliano en concert au Cully JAZZ festival.

Bien plus accessible que le Montreux Jazz festival et sa machinerie Pop. Je trouve la gare CFF et le train pour Vevey. En enjambant une clôture. Le train met 7 mn alors qu’il me reste 2h de marche au soleil.

 Le choix est vite fait. Je vois le distributeur de billets mais n’ai pas le temps de le prendre. Je voyage donc en fraude pendant 7 mn de Cully à Vevey. Pas de quoi ruiner les CFF.

Office de tourisme devant la gare. Fermé. Je descends au lac et trouve une fontaine pour remplir ma gourde. Et l’office de tourisme ouvert où je fais valider ma crédence de pèlerin pour Rome. Je prends un plan de la ville et trouve un coin à l’ombre, sur une pelouse, face au lac et aux Alpes. Parfait pour un après-midi pique-nique et baignade.

J’ai rendez-vous avec ma mère préférée et mes neveux qui visitent le musée Chaplin de Vevey. Raté car elle arrive à l’hôtel alors que je suis au lac et ne veux pas venir au lac. Bref.

Après-midi à l’ombre face au lac Léman et aux Alpes à manger, boire, me baigner, me reposer, regarder les bateaux, prendre des photos. Le parfait touriste, observateur et observé. De 12h à 16h. Puis je monte jusqu’à l’hôtel Abaca, facile à trouver grâce au plan offert par l’office de tourisme de Vevey.

L’hôtel est dans un immeuble avec une fontaine devant. Réception au 1er étage, chambres au 7e étage. Avec ascenseur. Le réceptionniste met le 1er tampon Via Francigena sur ma crédence. Il a été en internat chez les frères à Saint Maurice. Il connaît le chemin.

Après la douche, je bulle jusqu’à l’heure de sortir trouver un restaurant. Avec blouson et pantalon de pluie car l’orage menace. Sage précaution. Belles photographies du lac et des Alpes entre deux passages orageux. Les restaurants sont fermés ou complets. Un hôtel 3 étoiles a fermé son restaurant jusqu’au 24 juillet pour cause de vacances alors que le Montreux Jazz festival bat son plein et que les rues de Vevey sont remplies de touristes.

Je finis par trouver un restaurant traditionnel suisse, le Mazot. Un mazot c’est la cabane en bois des vignerons suisses. Ca se trouve aussi sur France, en Haute-Savoie.

Filets de perche d’Estonie (le lac Léman ne suffit pas à fournir la demande) bien préparés avec frites maison, tranche de citron, salade verte avec vinaigrette maison (pas de l’industrielle blanchâtre) au vrai vinaigre, pas au balsamique. J’apprécie. Dessert typique du Valais, sorbet abricot avec abricotine (alcool d’abricot. AOP suisse). Terrible. Verre de vin blanc suisse pas mémorable. Un jeune couple d’Américains s’assied à la table voisine. L’homme parle français car il a vécu 2 ans à Lausanne. Ils viennent de Washington. La grêle tombe. Il en ramasse et je lui apprends le mot « grêle ». En échange, il m’apprend le mot « hail » en anglais. Comme la chanson de Chuck Berry « Hail, hail, rock’n roll ». Ils sont alpinistes. Moi marcheur. Chacun est impressionné par les exploits de l’autre. La nuit dernière, ils dormaient dans un duvet, à flanc des Grandes Jorasses, au-dessus de Courmayeur(Italie). Je leur laisse la carte de mon blog Le jars jase jazz avec mon courriel.

Retour à l’hôtel sous la pluie, face aux éclairs. Je me perds d’abord puis suis la ligne de bus qui me ramène à la gare CFF de Vevey. De là, c’est tout droit en montant. La porte d’entrée de l’immeuble est ouverte. Heureusement car la réception de l’hôtel est fermée. Petit déjeuner continental à 7h. Il fera moins chaud demain après une nuit d’orage. D’après un panneau sur un quai de Vevey, il faut compter 6h30 de marche jusqu’à Aigle.

 

Mercredi 12 juillet : Vevey – Aigle. 27km

Départ : 8h

Arrivée : 13h

B&B Le relais du château à Aigle.

Bon petit déjeuner. En partant, je remplis ma gourde à la fontaine devant l’hôtel. Je redescends au lac. La rivière Vevyesse a énormément grossi après une nuit d’orage. Impressionnant. Je reprends le sentier le long du lac. La Riviera vaudoise. Un paradis pour riches que j’emprunte gratuitement. Je passe par la Tour du Peilz où le peintre français Gustave Courbet mourut en exil en 1877. Il y peignait des marines du Lac Léman.

Le sentier quitte le lac et remonte longer la route et la piste cyclable. Pas très intéressant alors que le ciel reste menaçant. Je repère un bus qui termine à Ravennaz ce qui m’avance sur mon chemin. Je monte dans le bus et une passagère m’explique comment prendre un billet au distributeur automatique. Pas d’achat au chauffeur comme à Paris. Rien compris à la logique suisse du distributeur. J’ai pris un billet mais pas le bon. C’est un progrès par rapport au train Cully -Vevey que j’ai pris sans billet.

Je ne suis donc pas passé à pied par Montreux. De toute façon, il était trop tôt pour les concerts du Montreux Jazz Festival. J'ai juste repéré une pharmacie Jazz au passage. Je parie qu'il n'y a pas eu en 2023 de concert aussi immense que celui de Gato Barbieri pour l'édition 1971, mon année de naissance. Cf vidéo sous cet article.

Arrivé à Ravennaz, je descends du bus et demande mon chemin pour Aigle à un homme qui promène son chien. Il m’indique un chemin par le bois et les Grangettes. Long mais beau me dit-il. C’est ça ou la route. Je choisis le chemin mais j’ai un doute. Un banc en métal sous un arbre me fournit le prétexte pour m’arrêter et regarder la carte. Je fais bien. Suivre ce chemin revient à revenir vers Villeneuve et le fond du Lac Léman, soit à l’opposé de mon objectif du jour.

Je vais à la fontaine du village. Non potable est-il écrit dessus. Un homme me rassure. Elle n’est pas contrôlée mais c’est de l’eau de source des montagnes. « J’en bois et je suis encore là ! » ajoute-il. Il m’explique le chemin et me donne de 1h30 à 2h pour le faire, selon mon rythme de marche. En fait, j’ai mis 3h.

Je n’ai jamais trouvé le sentier le long de la voie ferrée indiqué par l’homme de la fontaine. Je suis la route et la piste cyclable pour Aigle, à l’écart des voitures. Presqu’arrivé, je trouve le sentier et demande mon chemin à un vigneron qui inspecte ses vignes suite aux orages de la nuit précédente.

Il m’explique clairement le chemin pour Aigle. 1ère à droite. Au bout à gauche. Longer le terrain de football, prendre à droite, monter l’escalier, passer un pont, suivre le sentier, passer une passerelle métallique, puis à gauche.

Le long de la route, j’ai interrogé un autre vigneron sur les conséquences des orages. La grêle n’a pas fait trop de dégâts. Elle tombe au moins une fois par été. Il m’explique les vents, les orages et les montagnes. Je suis à Yvorne, village vigneron, en plaine, appellation de vin suisse, encaissé entre les montagnes.

Arrivé au bout de la route, je suis tenté d’aller à droite pour passer sous le pont ferroviaire. D’autant plus qu’il y a un terrain de football.

Je respecte cependant les indications du vigneron. Elles sont précises. Je débouche à la passerelle métallique et trouve les panneaux jaunes du tourisme pédestre en Suisse.

A gauche, Aigle, Aigle centre. A droite, Villeneuve par les Grangettes. Les indications du 1er homme consulté à Ravennaz n’étaient pas fausses. Elles m’auraient juste bigrement rallongé.

Pique-nique sur un banc avec la rivière qui gronde dans mon dos et un stade calme devant.

En ville, je ne trouve pas l’office du tourisme pour valider ma crédence de pèlerin. Je monte au château d’Aigle, y trouve une fontaine et appelle mon hôte. Il vient me chercher en voiture. Devant le restaurant en face du château, une vingtaine de sacs à dos, des bâtons avec bannières et 3 jeunes scoutes affalées par terre qui gardent le tout.

La maison est à 5mn de voiture. Un Suisse marié à une Brésilienne, ancien commandant de sapeurs-pompiers qui a créé son bureau d’études en sécurité incendie, soigne sa vigne dans son jardin et gère sa chambre d’hôtes. Il a longtemps travaillé en coopération avec des sapeurs-pompiers du Brésil d’où son mariage.

Petite chambre bien aérée avec vue sur le jardin. Salle de bains et WC communs à plusieurs chambres mais moins qu’à l’auberge de jeunesse de Lausanne évidemment.

Après la douche et le repos, je descends à pied en ville, trouve l’office du tourisme pour faire tamponner ma crédence, achète les premières cartes postales du voyage et repère les restaurants. Certains sont fermés. D’autres ne me plaisent pas. Je vais essayer la Pinte du Paradis, en haut, face au château. L’hôtesse de l’office de tourisme m’affirme que ce n’est pas que beau, qu’on y mange bien aussi. Je vais vérifier sur pièces et sur place, comme disent les comptables. J’ai laissé mes vêtements à la machine à laver de la maison.

Le guide officiel de la Via Francigena me semble optimiste. Il indique 18km et 5h de marche d’Aigle à Saint Maurice, mon étape de demain. Devant le château d’Aigle, la flèche jaune du tourisme pédestre indique 7h de marche. Je parie pour la 2e hypothèse. Je vérifierai cela demain.

La Pinte du Paradis n’usurpe pas son nom. D’abord parce qu’il y a le Clos du Paradis (vignoble) juste à côté. Puis une vue en terrasse splendide sur vignobles, ville et montagnes. Un accueil sympathique et des prix raisonnables. En ce moment, 1CHF = 1€ ou à peu près. La conversion est facile. Boeuf aux 3 poivres, frites et ratatouille. Carpaccio d’ananas, glace citron basilic grains de grenade et une fraise. Délicieux.

L’orage commence à tomber vers 20h alors que je rentre me mettre à l’abri à la chambre d’hôtes.

 

Jeudi 13 juillet : Aigle – Saint Maurice. Passage du canton de Vaud au canton du Valais.

18km officiels. + 300m de dénivelé.

Départ : 8h

Arrivée : 18h

Hôtel-restaurant La dent du Midi. Saint Maurice.

Petit déjeuner à 7h. La patronne est là. Bien mais pas aussi bon qu’à Saint Prex chez Claire-Lise et Jean-Luc.

Je récupère mes vêtements propres mais pas tout à fait secs. Gros orage cette nuit. Il pleut encore un peu ce matin. Pantalon et blouson de pluie.

Le guide officiel de la Via Francigena indique 5h de marche. Le panneau au château d’Aigle indique 7h de marche. Il m’a fallu 10h de marche, pauses incluses, pour arriver à Saint Maurice.

Le plus difficile fut d’atteindre Bex que le guide ne mentionne pas mais auquel tous les panneaux directeurs conduisent.

Sur le terrain, je suis le sentier des vignes qui va d’Aigle à Saint Maurice en passant par Bex (j’ignore si Emmanuel Bex a joué à Bex).

Longue étape aujourd’hui. J’ai bien fait d’abréger la veille pour arriver à Aigle en prenant le bus, l’avant-veille pour arriver à Vevey en prenant le train.

 

En chemin, je croise un banc et une balançoire, un pneu pendant à deux chaînes de fer accrochées à une branche au milieu du sentier. Jamais vu de balançoire sur un sentier en France. J’ai testé le banc pas la balançoire. Là j’ai perdu un embout en caoutchouc de bâtons de marche. Un couple de sexagénaires suisses, adepte du géo catching, m’aide et le mari le retrouve. Nouveau jeu pour eux. Ils ont souffert des tiques vers Dijon où je suis passé à l’été 2021. En remuant les branches pour trouver des indices, ils font tomber les tiques sur eux. Marchant sur le sentier balisé, j’évite ce désagrément.

Je passe par le Montet (688m). Le sentier monte, monte et je le perds presque en haut. Je sors sur une route forestière sans savoir où aller. Il est 13h et je marche depuis 8h le matin.

La fatigue se fait sentir et me rend plus idiot que d’habitude. J’entre dans une carrière de pierres alors qu’un grand panneau, écrit en français, indique bien que c’est interdit. Stupide et dangereux.

 Un camionneur me hèle et me remet sur le droit chemin sans m’engueuler alors qu’il aurait pu vu les risques encourus (explosifs, pierres, camions).

Je reprends la route forestière qui descend jusqu’à un carrefour de chemins avec des panneaux de tourisme pédestre.

Plusieurs directions indiquées mais pas celle de Bex. Les indications du camionneur sont claires et précises. Au tas de gravier, revenir en arrière. Bref, tourner à gauche à angle droit. La carte valide.

Je poursuis mon chemin et arrive à Bex pour 15h. Vu un couple âgé qui dormait face à face à la terrasse d’un café. La serveuse ne les a pas réveillés. Je suis à Bex, pas à Paris. Là je reprends le sentier des vignes pour Saint Maurice plutôt que la route. Après avoir rempli ma gourde à la fontaine. Petite route avec peu d’ombre. Le soleil est revenu. Je suis bien sur le sentier des vignes puisque je marche dedans. Une voiture me dépasse. Celle d’un vigneron qui va inspecter son bien.

Je continue de monter. Le sentier des vignes dit à gauche par la route. Le sentier pédestre dit à droite par un sentier. Je demande à un ouvrier qui taille une haie. Il arrête son engin, retire son casque anti bruit et m’explique gentiment que la route fait un détour. J’ai meilleur temps (expression suisse et franc-comtoise) de prendre le sentier pédestre. Sage conseil. Je débouche sur une communauté religieuse catholique : « La Source. La Pelouse ».  J’hésite sur le chemin à prendre. J’irai bien à droite mais le sentier pédestre dit à gauche.

Une voiture s’arrête. Une fenêtre s’ouvre côté passager. C’est une bonne sœur qui m’indique, avec le sourire, de prendre à gauche et qu’il me reste 1h de marche pour Aigle.

Sage conseil. Je suis ce chemin. Un panneau m’indique un sentier pédestre à droite pour Saint Maurice. Cela me semble bien raide après des heures de marche et deux chutes sans gravité dans la journée, en montant au Montet.

Je poursuis donc la route et le sentier des vignes. Je descends doucement par une route de vignerons, en lacets, trouve une fontaine pour remplir ma gourde (la Suisse est un Paradis fiscal à l’ombre des fontaines). Je discute de mon chemin avec un prêtre qui va à la communauté de femmes de la Source, la Pelouse. Une sœur et un prêtre dans la même journée. Manifestement, je quitte le canton de Vaud, protestant (Aigle première paroisse francophone au monde avec Guillaume Farel en 1528. Une plaque gravée le rappelle sur place) pour le canton du Valais, catholique, celui qui fournit les Garde Suisses au Vatican. Je suis bien en marche vers Rome.

Je débouche sur un carrefour de routes sans indication de Saint Maurice alors que la ville est sur l’autre rive du Rhône. Je demande mon chemin à 2 dames blondes sportives qui m’indiquent où trouver le pont sur le Rhône et comment arriver à Saint Maurice, canton du Valais.

J’arrive à Saint Maurice et appelle l’hôtel. La réceptionniste ne sait pas me dire le chemin et Google Maps ne passe pas. Je marche dans la Grand Rue (piétonne) et demande à un serveur qui m’explique de revenir sur mes pas. Service !

J’ai dîné dans son restaurant, le Napoli, en remerciement.

Je trouve l’hôtel. Douche et repos. Enfin !

Au Napoli, grande assiette de pâtes aux bolets, lardons, crème fraîche et parmesan. Grand soda noir américain. Coupe glacée vanille, chantilly et fruits rouges. Bref, la recharge en sucres rapides et lents après une longue journée de marche.

Je ne dors pas à l’hôtellerie franciscaine (pas repérée sur Internet) mais c’est là que je fais valider ma crédence. Vu mon heure d’arrivée, je n’ai vu l’abbaye de Saint Maurice que de l’extérieur. Imposante.

Demain matin, petit déjeuner à 7h. Partir tôt car seuls les 5 premiers pèlerins arrivés trouveront un lit au gîte paroissial de Martigny. Aucune réservation n’est possible. Premier arrivé, premier servi. Il y a de l’enjeu.

 

Halte pour randonneurs en Suisse

Halte pour randonneurs en Suisse

 

Vendredi 14 juillet : Saint Maurice – Martigny.

17km.

Départ : 8h

Arrivée : 13h

Gîte paroissial de Martigny.

Petit déjeuner correct mais sans plus. Je demande à remplir ma gourde. Je ne suis vraiment pas réveillé car j’essaie de la remplir avec le distributeur de lait froid. En plus, j’ose me plaindre à la serveuse que je n’y arrive pas. Elle me montre les bouteilles d’eau froide. Honte pour moi ! Bref, je pars avec un mélange eau froide & lait froid dans la gourde. Buvable. L’étape est courte et je dois tracer pour arriver à temps à la Maison paroissiale de Martigny. Seuls les 5 premiers arrivés seront logés pour 20CHF la nuit. Ce sera plus austère mais moins cher qu’une chambre d’hôtel. Pas de réservation.

Le sentier tourisme pédestre indique Martigny par un chemin qui ne correspond pas du tout au guide de la Via Francigena.

Je suis le sentier 70, celui de la Via Francigena en Suisse. Je le perds et le retrouve régulièrement.

A la sortie de Saint Maurice, je le perds. Je me retrouve à longer la route pour Martigny en évitant la bretelle d’autoroute. Pas agréable.

Je trouve un sentier pédestre « Vers le Bois Noir ». Carte et guide sont d’accord. C’est le bon chemin. Je le suis en forêt jusqu’à retrouver le sentier 70 de la Via Francigena vers Martigny. Je le suis, entre dans un village, le perd, reprend la route et le retrouve au village suivant, la Baltaz.

Ainsi de suite jusqu’à Martigny. Chemin sur une vallée glaciaire, plate comme la main mais entourée de montagnes. Le long de la route, j’admire la cascade de la Pissevache, la plus belle et la plus imposante de tout le parcours depuis Paris. A l’horizon, le massif du Mont Blanc. Avant l’arrivée à Martigny, le long de la route, magnifique verger d’abricots du Valais. J’en ramasse par terre, les goûte. Ils sont délicieux. Ils sont à vendre chez le producteur Constantin un peu plus loin. J’en achète 400g, hors poids du récipient plastique que j’ai dans le sac. Ils sont franchement meilleurs que ceux que L m’a offerts entre Nyon et Rolle, le premier jour de marche. Ce n’est pas de son fait. Les abricots du Valais ont une réputation méritée.

J’arrive vers 12h30 à Martigny, quartier de la Baltaz, celui du château fort qui domine la ville. Je finis avec le sentier du tourisme pédestre qui m’amène Place centrale au cœur de la ville. J’appelle la maison paroissiale et personne ne répond. Pause déjeuner. Je trouve l’église, en fait le tour et trouve la maison. Je sonne, la porte s’ouvre mais la secrétaire chargée de l’accueil revient à 14h.

Je vais déjeuner d’un bon burger et d’une glace suisse Movenpick au Loup Blanc, restaurant bien connu de Martigny.

Ensuite, je reviens me déclarer, faire tamponner ma crédence, payer mon séjour et m’installer vu que je suis le premier arrivé. Douche puis lessive à la main vu que j’ai le temps et qu’il fait grand soleil.

J’ai perdu le savon de Marseille pure huile d’olive Marius Fabre (recommandé par un ami Marseillais) et les pinces à linge que j’avais emmené exprès. Tant pis, je le lave au savon pour le corps, le rince et le fait sécher dehors au soleil et au vent sur un séchoir mis à disposition. Au Migros, il y a des boutiques mais pas de centre commercial curieusement. Je ne trouve pas de savon.

Impossible de se connecter au Wi fi de la maison. Réseau indétectable. Il est vrai que je suis dans une belle cave voûtée en pierre. Logis le moins cher et le plus original depuis le départ. Propre et fonctionnel. J’ai mon sac à viande pour dormir, ma serviette et mes affaires de toilette pour me laver. Coin cuisine. Grandes tables collectives pour partager repas et discussions. Evier. Douche. WC.

Je dispose des heures de prière catholique du soir (18h) et du matin (7h) mais ne suis pas obligé d’y participer. Comme me l’a dit la secrétaire à l’accueil, la Suisse est un pays tolérant (87 nationalités à Martigny). Le petit déjeuner est à 7h32. Précision suisse.

Etape tranquille après la longue et dure marche de la veille et avant le début de l’ascension des Alpes demain. Ca me fait du bien.

A Martigny, une flèche avec le portrait du Premier Consul Napoléon Bonaparte indique le passage de l’armée de réserve en mai 1800. L’événement a marqué les esprits ici.

J’ai fini par trouver un vrai savon de Marseille Marius Fabre à l’huile d’olive et au chèvrefeuille dans une épicerie fine de Martigny. Quant à mon savon et mes pinces à linge, je les ai retrouvés plusieurs jours plus tard bien cachés au fond de mon sac à dos.

Vers 17h, arrivée de 2 jeunes et joyeux compagnons, E le Belge de Gand, Flamand qui parle français et L un Anglais qui ne parle pas français à part quelques mots.

Longue discussion autour de la table commune. Ils fournissent la bouteille de vin suisse. Je fournis les pâtes de fruits bretonnes de l’abbaye de Landevennec (29). Bon échange.

E et moi parlons de nos vies de couple. Moi récemment divorcé, sans enfant. Lui jeune marié et jeune père avec une épouse tellement insupportable, selon ses dires, qu’il est parti marcher seul cet été. E finit ses études de médecin anesthésiste à Gand (Ghent). Il est jeune, beau mec, bon parti, sympathique. C’est du gâchis. Je lui ai conseillé le divorce mais vu qu’il est catholique pratiquant, jeune marié et jeune père de famille, il n’envisage pas encore cette solution.

L est un jeune Anglais qui a fini ses études de lettres (humanities in english). Il est parti seul de Cantorbery pour Rome il y a 2 mois avec un passeport et sans argent. Il a une grosse croix autour du cou et compte sur la charité chrétienne. Ca marche jusqu’ici. La preuve, E et moi l’invitons au restaurant ce soir. Après que L ait prié pour notre salut à 18h bien entendu.

Souper plus chic que mon dîner. A la vache qui vole. Bouchées à la reine aux morilles et sorbet citron au limoncello. Délicieux.

Rien visité à Martigny mais je me suis reposé et ai bien discuté et ri avec les deux pèlerins, belge et anglais, de la Via Francigena.

 

Samedi 15 juillet : Martigny – Orsières

20km. +450m de dénivelé.

Départ : 9h

Arrivée : 15h15

Hôtel restaurant Terminus à Orsières.

Dans la nuit, des lattes de mon sommier sautent sous mon poids (>100kg). Vers 5h du matin. Réveil brutal pour moi et la chambrée. Je change de lit. E m’a aidé à remettre la dernière latte avant de partir le matin. En échange, je lui ai offert un tour de cou trouvé par terre, en déplaçant le lit. Justement, il avait oublié d’en prendre un et ça lui manquait.

Petit déjeuner collectif avec les clercs. Plutôt sympathique et correct.

Chacun part de son côté. E veut marcher seul. L est lent au démarrage. Il m’a rattrapé en chemin à une fontaine et est reparti devant.

Etape longue et dure. Montée et descente dans des chaos rocheux en forêt. Deux fois, je manque les marques et pars pleine pente. Une fois en descente vers la rivière. Une fois en montée. Avec plus d’attention aux marques jaunes du tourisme pédestre, je retrouve mon chemin sans dommage.

Superbe pause pique-nique sous un ancien lavoir. Toit. Fontaine d’eau fraîche. Bancs.  Tables en bois. Poubelle. Au pied de la montée. J’ai bien fait de m’y arrêter pour reprendre des forces. J’y ai laissé à disposition mon petit reste de savon pour le corps vu que j’en ai acheté un autre la veille à Martigny.

Cette fois, j’ai bien suivi la Via Francigena, sentier suisse n°70, sans la perdre.

Au départ de Martigny, un vaillant marcheur m’a expliqué le choix à effectuer pour Bovenier. A droite, par la Via Francigena : plus facile, plus goudronné, moins beau. A gauche, le sentier plus difficile, plus beau, moins goudronné. J’ai pris le plus facile. Par contre, je n’ai pu échapper à la montée et descente dans le chaos rocheux.

Arrivé à Sembrancher, il me reste 1h30 de marche ou le train régional pour Orsières. Cette fois, j’ai le temps de prendre un billet au distributeur : 4,40CHF. 10mn de train au lieu de 1h30 de marche et mon hôtel est en face de la gare. Bon plan. Aucun regret. L’office de tourisme se trouve dans la gare. J’y fais tamponner ma crédence.

Les montagnes sont de plus en plus proches et de plus en plus imposantes. Je suis loin désormais de la Riviera vaudoise devant le lac Léman.

Séchage de poissons sauvages du Lac Léman

Séchage de poissons sauvages du Lac Léman

J’ai réservé un dortoir pour 4 au 3e étage de l’hôtel, sans ascenseur et n’ai pas à le partager. Je peux donc m’étaler et me reposer dans la chambre en attendant le dîner sur place.

La flèche de départ pour Bourg Saint Pierre est à 100m de l’hôtel. J’écris et poste 3 cartes postales de Suisse en buvant en terrasse un soda noir américain pour la recharge en sucres rapides.

Dîner seul à l’hôtel. Grande assiette des artisans avec charcuterie et raclette AOP du Valais, pain de seigle, beurre, cornichons et petits oignons. Pas de salade. Pas de vin. Eau minérale suisse Henniez avec bulles. Reconstituant. En dessert, tarte aux abricots du Valais et glace au génépi. Délicieux. Je reste dans le local jusqu’au bout avec une infusion aux plantes de montagne et un verre de génépi offert par la maison. Plus liquoreux que le Savoyard. Je confirme. Je ne renie pas la mère de ma mère et préfère la version savoyarde du génépi.

Arrivée du bateau de la CGN à Vevey

Arrivée du bateau de la CGN à Vevey

Dimanche 16 juillet : Orsières – Bourg Saint Pierre

14,5km. + 750 m de dénivelé.

Départ : 7h50

Arrivée : 13h30

Maison Saint Pierre à Bourg Saint Pierre.

Excellent petit déjeuner. Le meilleur depuis le 1er jour à Saint Prex. Fromage blanc artisanal. Confitures idem. Jus de pomme local. Fromages, jambon, œufs brouillés, saucisses.

Démarrage facile puisque le panneau de direction du sentier est à 100m de l’hôtel face à la gare.

Chemin facile en forêt. Via Francigena bien indiquée. A un croisement où j’hésite entre les 2 chemins pour Bourg Saint Pierre, je suis rejoint par Joakim, 74 ans, Allemand devenu Suisse et vaillant marcheur. Joakim parle aussi français et anglais alors que je parle aussi anglais et italien. Joakim est mari, père et grand-père. De métier, il était médecin addictologue, directeur d'un service de désintoxication des toxicomanes. Bref, c'est un homme de qualité.

Nous marchons ensemble toute la journée. Dans un paysage de carte postale touristique et pittoresque. Belles montagnes, belles pelouses, belles forêts, beaux ruisseaux, belles maisons. Tout est parfait.

En vrai Sage, Joakim voyage beaucoup plus léger que moi. Juste un croissant pour son pique-nique. Assis sur un muret, le long du sentier, face au ruisseau et aux arbres. Cadre splendide. Végétarien, il refuse les conserves de poisson de la Belle Iloise mais accepte avec délice les fruits secs de Paris et les abricots du Valais.

Arrivée tranquille à Bourg Saint Pierre, dernière commune suisse avant l’Italie. Je trouve la Maison Saint Pierre grâce à Daniel, un étudiant néerlandais qui a rencontré Joakim la veille, y loge mais n’a pas le code d’accès. 4 chiffres pour ouvrir la porte. Je les ai et cela fonctionne.

Joakim va à l’hôtel du Crêt. La maison Saint Pierre est un gite magnifique en autogestion. Enveloppe pour mettre le billet de 20CHF + boite aux lettres pour glisser l’enveloppe. 4 chambres dortoirs. Une immense cuisine avec machine à laver le linge. Douches et WC collectifs. Pas de lessive, pas de nourriture. Daniel et moi avons lavé notre linge à la main et mis à sécher dans la cour sur un séchoir, au soleil et au vent.

Quelqu’un frappe à la porte. C’est Joakim. La patronne de son hôtel est folle, selon lui. Il a réservé mais elle prétend qu’elle ne connaît pas sa réservation. Elle ne lui prête aucune attention. IL a réservé mais pas payé et vient chercher refuge au gîte paroissial. Cela fait 3 hommes pour 4 chambres et 18 lits. Nous l’accueillons avec grand plaisir.

Pas de wi fi  à la maison Saint Pierre. Calme assuré.

La crédence de la Via Francigena se tamponne à l’entrée de l’église du village. Au village, sur une maison, une plaque rappelle que le Premier Consul Napoléon Bonaparte a dormi là une nuit de mai 1800 conduisant l’armée française vers l’Italie.

Le restaurant les Charmettes , conseilléeaux pèlerins, est fermé le dimanche soir me dit une mamie du village qui m’en conseille un autre plus loin.

1600m d’altitude. Il fait beau mais frais.

18h, arrivée d’un nouveau pèlerin au gîte, Marc, 69 ans, Français de Lorraine qui s’est fait une étape double aujourd’hui, de Martigny à Bourg Saint Pierre sans arrêt à Orsières. Il occupera donc la 4e chambre.

A 18h30, nous sommes tous propres et secs et partons à la recherche d’un restaurant ouvert. Divine surprise. L’auberge des charmettes a changé de propriétaire en juin et est désormais ouverte le dimanche soir. La mamie que j’ai interrogée ne devait pas connaître ce changement. Nous nous installons en terrasse avec vue sur les Alpes du Valais. Pour moi, boite 3 étages avec fromage, jambon et oeuf. Je n’ai pas voulu essayer le 4e étage avec tomate. Terrible. Panacotta aux fruits rouges. Infusion de menthe fraîche pour les 4 en digestif.

Bonne ambiance à table. Daniel est Néerlandais, parle quelques mots de français. Marc le retraité français ne parle pas anglais. Joakim parle mieux anglais que français. Je fais l’interprète. Marc est arbitre de football, président de son club près de Nancy, a l’hymne de la Champion’s League comme sonnerie de portable mais personne ne parle football.

Verger d'abricots du Valais à Martigny

Verger d'abricots du Valais à Martigny

Ca fraîchit avec l’air du soir. Le tshirt devient insuffisant. J’aurais dû sortir le sweat shirt du sac à dos. Heureusement, le repas et l’infusion me réchauffent.

Comme il n’y aura pas de petit déjeuner, Joakim propose de partir à 6h30. Je propose 7h car il faut faire un minimum de ménage (salle de bains et WC, chambres. Cuisine non utilisée) avant de partir.


E, le Belge rencontré à Martigny, devait dormir ici ce soir mais il n’est pas venu. Une enveloppe laissée à son nom me l’a indiqué.

Soir d'orage à Vevey

Soir d'orage à Vevey

Lundi 17 juillet : Bourg Saint Pierre – Col du Grand Saint Bernard

Départ : 7h30

Arrivée : 13h30

11,5km. +800 m de dénivelé. 

Hospice du Grand Saint Bernard au col. Le col du Grand Saint Bernard relève de la commune de Bourg Saint Pierre côté Suisse, de la commune de Saint Rhémy de Bosses côté Italie.

Le guide indiquait 4h de marche. J’ai mis 6h pause incluse pour atteindre le point culminant de la Via Francigena et de mon chemin de Paris à Rome, le col du Grand Saint Bernard (2473m sur le versant suisse).

Réveil à 6h. Pas de petit déjeuner. Les Français, Marc et moi, nettoient la salle de bains et les WC communs. Mon linge a fini de sécher dans la nuit, à l’intérieur. Je n’ai plus qu’à le ranger dans mon sac à dos et à remettre le séchoir, plié, à sa place.

Marc part dès 6h50. Adepte des étapes longues, il marche aujourd’hui jusqu’à Etroubles où je dormirai demain. Il fait en une journée ce que je fais en 2 jours. Chacun sa façon de marcher.

Je pars avec David et Joakim. Joakim laisse son sac sur place car il reviendra ce soir en bus et compte bien dormir de nouveau à la Maison Saint Pierre.

Ca y monte comme on dit sur Suisse et sur France. De 1600 à 2473m. Dans un paysage de carte postale avec ruisseaux, arbres, rochers et vaches. Je suis le seul à avoir prévu un pique-nique. Je monte beaucoup plus lentement que les deux autres mais ils m’attendent à intervalles réguliers.

Nous nous arrêtons à la buvette au-dessus d’un lac de barrage à 9h. Thé froid pour Daniel et moi, café chaud pour Joakim qui invite tout le monde. Plus haut, nous rejoignons Chris et Irum. Un Américain de l’Arizona qui marche ici avec son fils, adolescent de 16 ans. Très sympathiques. Le travail de Chris est d’aider des handicapés à trouver du travail et à le garder.

J’en bave dans la pente et ai du mal à finir mais il faut bien arriver au col où le fameux hospice du Grand Saint Bernard m’attend. Comme mes bâtons me font défaut, Joakim me prête les siens pour l’ascension.

Une fois au col, Joakim me hèle sur la route. Les 4 sont attablés au restaurant et m’attendaient pour commander. Pour ma part, penne au fromage et aux lardons. Dernière tarte aux abricots du Valais et crème fraîche. Soda noir américain pour la recharge en sucres rapides. Après une longue dispute sur l’addition, Chris paie tout sauf les desserts. Merci à lui et à sa générosité. God bless America! 5CHF à ma charge. J’ai rendu ses bâtons de marche à Joakim évidemment.

L’épouse de Chris est chanteuse de Jazz. Je  laisse à Chris ma carte de visite avec l’adresse de mon blog Le jars jase jazz. Jamais rien reçu de sa part. Même dans les spams. Tant pis. 

Joakim s’arrête là et prend le bus pour Bourg Saint Pierre à 16h50. Daniel poursuit vers l’Italie et je lui recommande le dortoir d’Etroubles où je dormirai demain. Chris et son fils partent de leur côté.

Il ne me reste plus qu’à m’installer à l’hospice du Grand Saint Bernard qui accueille les pèlerins depuis l’an 1050 et sa fondation par Saint Bernard de Menthon. Sa famille possède toujours le château de Menthon (74) au-dessus du lac d’Annecy et le châtelain est maire de la commune.

L’hospice mérite sa réputation. Immense, solide et austère. Chambre pour 4 où je suis seul. Pas de draps, pas de serviettes mais couvertures et oreiller avec taie. Cabinet de toilette. Douches et WC communs. Tout propre en ordre, à la suisse. Beaucoup de mal à comprendre le fonctionnement de la douche, soit trop chaude, soit trop froide. A la fin, j’y arrive. Vent glacial dehors. Pas de wi fi. Je suis en montagne. A l'hospice du Grand Saint Bernard , même en cas de tempête de neige, il ne peut rien vous arriver.

Dîner collectif à l’hospice après la messe du soir à laquelle je n’assiste pas. Je suis assis en face de 2 Italiens. Un couple de Stéphanois. Une famille franco suédoise avec père, mère et 2 petites filles. Je finis par parler de ma marche de Paris à Rome. Cela intéresse beaucoup les Italiens. L’un est Toscan et m’affirme que le plus beau passage du trajet est en Toscane mais qu’il faut éviter de le faire l’été, à cause de la chaleur. Je retiens le conseil.

Au menu, soupe de champignons maison, pâtes avec sauce viande et champignons, gâteau aux prunes rouges. Pain, eau. Ni vin, ni fromage. Un sirop maison aux fruits rouges très sucré. Dressage et débarrassage collectif de la table. Tout le monde participe.

Après le repas, je trouve un beau salon de jeu et de lecture, avec des fauteuils confortables et des beaux livres sur la montagne. Malheureusement, trop peu de lumière. Je renonce et vais me coucher.

Petit déjeuner à 8h après la prière du matin à 7h15. Un peu tard pour un randonneur mais je le prendrai quand même.

Souvenirs impressionnants de Napoléon Bonaparte dans l’hospice même. Une plaque de remerciement de la République du Valais du 2 décembre 1804, date de son couronnement comme Empereur des Français à Notre Dame de Paris. Un mémorial en marbre du général Desaix mort à la bataille de Marengo pendant la campagne d’Italie, l’an VIII de la République française (1800), commandé en Italie par Napoléon et livré, sur son ordre, à l’église du Grand Saint Bernard. Aujourd’hui dans l’hospice. Sachant que l'église se trouve dans l'hospice. 

La trace de Napoléon se voit aussi dans le paysage. Au col même une plaque rappelle qu’il est passé avec l’armée française et ses 46 922 hommes en mai 1800, sachant qu’il n’y avait pas de route à l’époque et qu’il pouvait y avoir encore de la neige. Le Giro d’Italia 2023 a dû renoncer au passage du col fin mai à cause de la neige. Les soldats français de la République et de l’Empire, c’étaient vraiment des solides. Une autre plaque célèbre le souvenir de ce passage mémorable et l’amitié entre les habitants des deux vallées qui se rencontrent au col du Grand Saint Bernard, le val d’Entremont pour la Suisse (Valais) et le val du Grand Saint Bernard pour l’Italie (Val d’Aoste).

Montée vers le col du Grand Saint Bernard

Montée vers le col du Grand Saint Bernard

Mardi 18 juillet : Col du Grand Saint Bernard (CH) – Etroubles (I). Entrée en Italie par le Val d’Aoste.

15km. - 1200m de dénivelé.

Départ : 9h

Arrivée : 14h30

Dortoir d'Echevennoz. Etroubles frazione (hameau) Echevennoz.

Changement de guide papier. Je passe de la Via Francigena de Cantorbery (Angleterre) au Grand Saint Bernard (Suisse) à la Via Francigena du Grand Saint Bernard (Suisse) à Rome Italie)

Au petit déjeuner, je retrouve L, l’Anglais de Martigny. Il est arrivé hier à 21h30 à l’hospice et y a trouvé l’abri pour la nuit. Nous discutons un peu. Aujourd’hui, il reste ici se reposer. Il me prend en photographie au départ devant le lac de Joux (Joux vient de Jovis, Jupiter. Une nouvelle trace de Rome sur mon chemin) qui fait le lien entre Suisse et Italie.

Je prends le sentier au-dessus du lac et trouve vite la borne frontière. I 1931. Ce n’est pas l’altitude mais l’année. Période fasciste. Logique vu l’obsession de Benito Mussolini pour la souveraineté nationale.

En mars 2019, je suis parti de Paris Notre Dame au kilomètre 0 des routes de France. En juillet 2022, j’ai quitté la France pour la Suisse. En juillet 2023, je quitte la Suisse pour l’Italie. Il me reste environ 1000km pour atteindre Rome et son Forum, borne miliaire de départ des routes de l’Empire romain.

J’arrive ensuite au Plan de Jupiter christianisé par une immense statue de Saint Bernard qui regarde vers la Suisse. Le sentier descend vers la route pour Aoste, la coupe mais ne la longe pas.

C’est aussi bien balisé qu’en Suisse. Le Val d’Aoste investit dans le tourisme vert. Cela se voit sur la Via Francigena. Nombreuses balises. Nombreux panneaux d’explication. Nul besoin de carte ou de guide. C’est très clair.

Dès le début, je rejoins un couple d’Italiens quinquagénaires qui, lui aussi, descend du Grand Saint Bernard vers Aoste. Je les prends en photo. Ils me prennent en photo. Puis je les perds de vue car leurs sacs sont bien plus légers que le mien et qu’ils marchent bien plus vite.

Le Val d’Aoste en Italie est aussi grandiose que le Val d’Entremont en Suisse. Descente du Grand Saint Bernard dans un décor de ruisseaux et de fontaines qui coulent dans tous les sens.

A Saint Rhémy de Bosses (1600m), premier village italien avec de quoi tamponner la crédence près de la fontaine et une fiche à remplir pour les statistiques (nationalité, trajet, but du chemin). Pour le mois de juin 2023, une 30ne de Français, une 30ne d’Australiens et un Namibien.

Je trouve aussi le vrai jambon d’Aoste, le prosciutto di Bosses AOP, produit ici depuis l’an 1397. Rien à voir avec la cochonnerie industrielle française vendue sous le nom de jambon d’Aoste. J’en achète tranché fin (rosa d’Aosta) pour mon pique-nique avec des tegole (tuiles aux noisettes). Le vendeur ne parle ni français, ni italien. Il parle patois. Sa grand-mère est de Chamonix (74). La mienne est de Groisy (74). Nous nous comprenons.

Je me pose vers 12h45 à Saint Oyen. En lisière d’un champ et de la route, à l’ombre d’un arbre, avec une poubelle et le ru neuf (nom du ruisseau) qui coule à mes pieds. J’enlève chaussures et chaussettes de marche et trempe mes pieds chauds dans le ruisseau froid. Excellent soin.

En traversant un champ, je me fais arroser par le système d’irrigation. Par ce beau soleil d’été, c’est agréable. Je finis par trouver Etroubles. Je suis bien en Italie. Il est 13h30. La farmacia et le Carrefour Market sont fermés jusqu’à 16h. La bibliothèque communale est fermée le lundi et le mardi.

J’appelle mon gîte et me fais expliquer le chemin en italien. Je finis par trouver le cimetière et la Via Francigena qui le longe direction Gignod (ma direction demain avant Aoste) et arrive au hameau (frazione) d’Echevennoz, commune d’Etroubles devant un gîte de luxe dénommé l’Abri.

Le mien est plus modeste. Je rappelle et la patronne m’explique que je dois prendre le sentier qui descend à la chapelle. C’est ce qu’écrit mon guide aussi, très précis. Je descends, trouve la chapelle, la trattoria et la patronne qui parle français. Je suis dans la seule région francophone d’Italie, le Val d’Aoste.

Je suis arrivé au dortoir d’Etroubles à Echevennoz. Deux chambres à 6 lits se font face. Le couple d’Italiens est dans l’une. Moi dans l’autre. Salle de bains et WC communs au fond du couloir.

Dernière lessive à la main. Je fais comme à Bourg Saint Pierre en Suisse. Séchage dehors le jour, dedans la nuit. A Etroubles, il fait chaud mais lourd, avec des gouttes de pluie et des rumeurs d’orage au loin. Environ 1150m d’altitude. J’espère que mon linge sèchera dehors mais les dieux ne me le garantissent pas.

La patronne m’a demandé de passer la voir avec ma carte d’identité pour m’enregistrer. Je l’ai fait dans les hôtels en Suisse mais pas dans les gîtes catholiques. A Bourg Saint Pierre, j’ai payé 20CHF la nuit sans rien à manger le soir mais avec un grand confort (super douche, machine à laver le linge, chambre du révérend Prieur). Au Grand Saint Bernard, j’ai payé 75CHF avec souper (soir) et déjeuner (matin) mais moins confortable à mon avis.

En tout cas, à 15h30, après douche et lessive, le bar est fermé. Personne pour m’enregistrer. Pas de menu affiché dehors. Pas d’inquiétude. Je suis en Italie, dans le Val d’Aoste. Je vais bien manger, la patronne parle français et moi italien.

Etape facile et belle. Un Paradis pour marcheurs en pente douce pour descendre avec des vues splendides sur les montagnes, des ruisseaux et des fontaines partout. En Italie, la Via Francigena est marquée d’un trait blanc surmonté d’un trait rouge. L’inverse du drapeau polonais qui sert de marque aux GR (sentiers de grande randonnée en France). Dont le GR2 sentier de la Seine et le GR59 Echappée jurassienne que j’ai parcouru pour aller de Paris à la Suisse. Pour un marcheur français, c’est un repère facile et commode. Outre la silhouette du pèlerin avec robe de bure et bâton

Quand je rentre dans la trattoria pour faire tamponner ma crédence, je lis l’ardoise et le menu est alléchant. Surprise, m’est servi le menu pour pèlerins qui n'est pas affiché. Délicieux d’ailleurs. En entrée, passato dell’orto. Un potage de légumes du jardin. Avec parmesan à ajouter. Pollo con spinachi. Pilons de poulet préparés divinement avec des épinards frais dans une sauce exquise. Pain pas terrible. C’est l’Italie. J’insiste pour la salade verte et obtient un saladier de salade verte du jardin. Plus huile d’olive et vinaigre à ajouter. Je demande du fromage local et obtiens de la fontina, le grand classique du Val d’Aoste (AOP d'Italie) et une ricotta di mucca, fromage de vache ultra frais. Crostata di frutta pour finir. Tarte à la crème avec fruits des bois. Bon mais un peu étouffe chrétien comme disaient mes grand-mères.

Je dîne à une table voisine du couple milanais et je leur explique mon chemin de Paris à Rome. Infusion de fruits de bois pour finir. Pas artisanale mais italienne au bon goût et bon parfum.

Descente vers Aoste

Descente vers Aoste

Mercredi 19 juillet : Etroubles – Aoste – Turin

14km. - 600m de dénivelé.

Départ : 9h

Arrivée : 12h30 (Aoste)

Hôtel Torino Centro à Turin.

Bonne nuit bercé par l’orage, fenêtre ouverte pour ne rien manquer du spectacle. Le linge a fini de sécher dans ma chambre.

Petit déjeuner à 8h. Je pensais que c’était tard mais c’est une bonne idée car la pluie tombe à 7h et cesse à 8h15.

Gourde remplie à la fontaine au-dessus de la chapelle. Grand soleil pour le départ. Sentier superbe en forêt longeant le ruisseau, le Ru Neuf, que j’ai déjà suivi hier. Il chante joyeusement après la pluie. Sentier facile et bien balisé jusqu’à Aoste. Beaux points de vue sur les Alpes en chemin.

Le couple de Milanais me rattrape. Ils ont fui la ville et ses 40°C pour respirer en montagne. Nous échangeons nos coordonnées, nous photographions. Le mari dirige un bureau d’études sur la mobilité et la circulation à Milan. Ils ont croisé un agent de la RATP en chemin. Je leur apprends la traduction parisienne : Rentre Avec Tes Pieds ! A Milan, aussi, il y a des grèves et des travaux dans les transports publics. Rentré à Paris, j’ai écrit au Signore qui m’a envoyé la photo de sa femme, lui et moi sur le sentier.

Je croise un Italien, jeune retraité sportif, qui lui monte vers le Grand Saint Bernard, allant à pied de Rome à Cantorbery. Il se prend en photo avec moi.

Pas de difficulté pour trouver Aoste et son centre historique. D’abord, achat de 10 cartes postales du Val d’Aoste que je posterai en France. Puis déjeuner valdaotain au restaurant Ad Forum en terrasse à l’ombre , près du Forum romain d’Aoste. Charcuterie et fromages en antipasto. Ravioli viande en primo piatto. Bœuf et petits légumes en secondo piatto. Crème brûlée et tegole en dessert. Un verre de vin blanc du Val d’Aoste. Une bouteille d’eau minérale gazeuse. Un verre de liqueur de romarin offert. Aussi copieux que délicieux. 40€ sans les boissons. Ca les vaut. Belle conclusion gastronomique du passage des Alpes, de la Suisse à l’Italie.

La cathédrale est fermée mais la mairie est ouverte. C’est donc à la mairie que je fais tamponner ma crédence de pèlerin pour Rome.

Je cherche et finit par trouver une boutique de produits locaux, Alpenzu. Alpenzu c’est aussi le nom d’un village et d’un refuge du Val d’Aoste, à Gressoney Saint Jean. J’achète de la fontina, du jambon cru mûri au génépi, du miel de rhododendron. Tout est délicieux.

En errant et en cherchant la gare pour prendre le bus pour Turin, je trouve l’ancien couvent Saint Bénin ou a lieu une exposition de photographies de Robert Cappa (1932-1954). Je la visite au pas de charge car il me reste 1h15 avant le départ du bus. Des images connues, d’autres inconnues et toujours ce souci de l’humain chez Cappa, qu’il soit en paix ou en guerre. Exposition visible à Aoste, Val d'Aoste, Italie, jusqu'au dimanche 24 septembre 2023.

Ensuite, la gare des FS (Ferrovie dello Stato) est à 5mn à pied et la station de bus en face. Je trouve mon bus qui part avec 10mn d’avance (le chauffeur a vérifié tous les passagers avant de partir) et arrive à temps à Turin.

Sorti du bus à  Turin, j’entends un groupe d’Africains parler français. Je leur demande le chemin de la gare. Ces Camerounais me donnent une réponse claire, nette et précise pour accéder rapidement à la gare de Torino Porta Susa. Ils ont des reproches à faire au gouvernement français. Je me garde bien de leur dire mon métier et les remercie.

Je trouve mon hôtel en face de la gare. Je suis prêt à prendre le TGV de 7h36 demain matin pour Paris gare de Lyon. Descente à Chambéry pour prendre le TER AURA pour Annecy et rejoindre la famille Lagrée en Haute-Savoie pour finir les vacances ensemble.

Très belle randonnée où il est difficile de se perdre tant elle est bien balisée et fléchée en Suisse comme en Italie. Confort et propreté des gîtes des deux côtés de la frontière. Bonne cuisine des deux côtés mais plus subtile en Italie évidemment. Magnifiques paysages en montant 2100m de dénivelé du Lac Léman au col du Grand Saint Bernard en 9 jours, puis en descendant 1800m du Grand Saint Bernard à Aoste en 2 jours. La montée fait travailler le cœur et la respiration, la descente fait travailler les articulations.

De belles rencontres en chemin. D’abord, celle organisée à Nyon, au départ, avec une amie d’enfance, L. avec qui j’ai renoué les liens en marchant et en parlant le long du lac Léman, de Nyon à Rolle. Puis avec celles liées au hasard. L & E à Martigny. L que j’ai retrouvé le matin du départ du Grand Saint Bernard. Joakim avec qui j’ai fini l’étape jusqu’à Bourg Saint Pierre. J’espère vieillir comme cet homme qui pourrait être mon père (22 ans de plus que moi). Daniel, l’étudiant néerlandais rencontré à Bourg Saint Pierre, qui est monté au Grand Saint Bernard avec Joakim et moi. Chris et son fils Irum avec qui nous avons marché jusqu’au Grand Saint Bernard et qui a invité tout le monde à déjeuner. Dommage qu’il ne m’ait pas transmis les vidéos de son épouse chanteuse de Jazz. Carlo et ? le couple de Milanais avec qui j’ai descendu du Grand Saint Bernard à Aoste, moi derrière et eux devant car plus légers et plus rapides.

Sac à dos trop lourd par ma faute. Il faut vraiment que je me force à devenir zen, à alléger ma charge même si, lors du prochain tronçon,  en 2024, d’Aoste à Pavie, je ne ferai que descendre, du Val d’Aoste à la plaine de Lombardie en passant par celle du Piémont.

Le col du Grand Saint Bernard étant fermé d’octobre à juin, même si l’hospice reste toujours ouvert, cette randonnée se fait l’été. Attention à la chaleur au départ du Lac Léman. Elle diminue en montant évidemment mais le soleil brûle toujours.

Les photographies de cet article ont été prises en chemin par Guillaume Lagrée. Toute utilisation de ces oeuvres sans autorisation de leur auteur constitue une violation du Code de la propriété intellectuelle passible de sanctions civiles et pénales.

Descente vers Aoste

Descente vers Aoste

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